CHARLES HAIR

″Je les regarde longuement avant de préciser leur forme […]. Je reçois la confirmation d’un savoir que je ne savais pas m’appartenir. Je demeure aux aguets, attentif.″
Roger Caillois, Le fleuve Alphée, 1978

Le céramiste, nous paraissons l’avoir oublié, procède d’un très ancien savoir. Et pour la plupart d’entre eux, il demeure souhaitable de se conformer à la fonction utilitaire des pièces. Même chez un grand maître de l’émail tel que Charles Hair, la beauté des créations semble toujours comme un accomplissement de l’usage. “Je suis potier” dit-il, avec cette réserve qui lui est propre, et cette grande pudeur dont il témoigne devant les louanges trop appuyées.

Et pourtant, à l’œuvre depuis quarante ans, obstiné et méditatif, il a oublié depuis longtemps son passage à ses débuts chez un vieux maître japonais, pour, à l’évidence, devenir lui-même un maître. La virtuosité des émaillages où se déploient des paysages éclaboussés, des lieux en suspension, des visions et des silences, s’accorde avec la force plastique des formes. De ci de là, sur les pots, les vases, les bols, apparaissent des pincements de matière, des traces erratiques, des glyphes paraissant sourdre de la paroi ancienne, des orifices fragiles, des incisions : tout un ensemble de signes témoignant du contact physique du céramiste avec la terre. Une terre charnelle, qui respire et vit, à laquelle il faut consentir si l’on veut lui donner forme.

La grande technicité des émaillages se dissout de la sorte dans l’exigence de plénitude formelle, c’est un accord intime dont la puissance de suggestion nous émeut. Rien ici n’est pourtant ″spectaculaire″, ni excès ni démesure : la franche cordialité des pièces signe un univers où la beauté, dans sa discrétion même, acquiert l’évidence d’une chance.

Michel Cegarra

Exposition du 30 avril au 7 juin 2016.
Vernissage le 30 avril de 18h à 21h. 

Vernissage précédé d’une rencontre avec l’artiste à 17h.

Ouvert tous les jours de 11h à 19h.

L’EXPOSITION EN IMAGE